Le syndrome de Saddam
[13 novembre 2024] - Edito de Bédros Terzian, président du Fonds Arménien de France

La terre n’a jamais été aussi exiguë sous les pieds des Arméniens. Depuis 2000 ans, leur territoire se rétrécit. Aujourd’hui, il ne couvre plus que 29 743 km2, l’Arménie actuelle. Dans cette évolution de long terme, les chocs d’empires, les démembrements de royaumes et les invasions barbares ont joué des rôles majeurs, certes. Mais avec les massacres d’Abdülhamid (1894-1896), le génocide de 1915-16 (Jeunes Turcs) et de 1921-22 (Atatürk), les guerres d’Ilham Aliyev (2020-2023) c’est une éradication systématique des Arméniens qui est en marche. Les éradicateurs visent à vider cette terre de ses habitants d’origine (des « chiens » : c’est le mot qui revient dans leurs bouches), à y implanter des populations turciques ou turcisées, effacer les preuves archéologiques de l’histoire, réécrire l’histoire.

Il faut donc bien comprendre que la phase qui va de la « guerre de 44 jours » à la perte de l’Artsakh s’inscrit dans un continuum historique qui n’est pas clos. L’Azerbaïdjan attend la première occasion pour tenter d’occuper le sud de l’Arménie, soit en y perçant un « corridor », soit en lui arrachant la province de Syunik, voire plus. Grisé par ses victoires, Aliyev brûle de passer à l’histoire comme celui qui aura instauré la continuité territoriale turcique ininterrompue – allant de la  race orientale aux steppes de l’Asie centrale – du grand rêve pantouranien. Bakou accroît démesurément ses dépenses militaires ($ 4,2 milliards en 2024), tout en sommant l’Arménie de ne pas chercher à se réarmer pour se défendre ($ 1,3 milliard).

Comme l’Irak de Saddam Hussein au sortir de sa guerre contre l’Iran (1988), l’Azerbaïdjan est aujourd’hui surarmé. Et comme le dictateur de Bagdad, qui a envahi le Koweït en 1990, Aliyev est tenté d’utiliser sa force. Il le dit. « Le processus de transformation de l’Azerbaïdjan en un pays important dans une géographie plus large se poursuivra avec succès », a-t-il ainsi déclaré le 4 octobre 2024. « Je n’ai aucun doute là-dessus. Notre politique le dicte et notre potentiel le montre ».

L’Arménie est en danger : elle doit être soutenue, par tous les moyens. Beaucoup (au nombre desquels des États importants) l’ont compris. Mais d’autres, ici et là, ne semblent pas avoir pris toute la mesure de la menace. Il faut donc le marteler avec force, avec insistance : l’heure n’est pas aux dissensions. Nous n’avons pas droit à l’erreur : l’unité des rangs et la mobilisation de chacune et de chacun sont des impératifs historiques.

TOUTES LES ACTUS
APPEL AUX DONS
Merci pour votre Générosité
Grâce à vous nous pouvons agir chaque jour pour aider à la reconstruction de l’Arménie.