La coopération internationale constitue l’une des cinq missions de l’enseignement agricole français. Mise en œuvre par différents réseaux à travers le monde, son but est de mettre en relation les acteurs d’écoles agricoles étrangères avec leurs homologues français afin de leur permettre de développer des projets. Nous avons rencontré Evelyne Bohuon, enseignante en biologie-écologie au lycée agricole de Caulnes (Côtes-d’Armor) et animatrice du réseau Arménie, pour en savoir plus sur cette mission.
Qu’est-ce qui vous a poussée à vous lancer dans cette mission ?
Evelyne Bohuon : J’ai travaillé dans la recherche à l’étranger et quand je suis revenue en France, il y a une trentaine d’années, je ne trouvais pas de poste dans la recherche. Je me suis alors redirigée vers l’enseignement agricole. Au lycée de Caulnes, je suis référente Erasmus+ depuis de nombreuses années, mais je souhaitais élargir mon implication dans la coopération internationale. Sur les conseils d’une collègue qui était animatrice du réseau Pologne, j’ai postulé auprès du BRECI* et en septembre 2020, le réseau Arménie est né. En 2024, ce réseau s’est élargi au Kazakhstan.
Quel est votre rôle en tant qu’animatrice du réseau Arménie ?
E. B. : Ma mission consiste à comprendre l’enseignement agricole en Arménie, par le biais de rencontres avec le ministère de l’Éducation et le personnel des collèges agraires – l’équivalent de nos lycées agricoles – afin de déterminer les besoins de ces derniers et de les mettre en relation avec des établissements français. Jusqu’à présent, j’ai rendu visite à onze des treize établissements arméniens au cours de quatre missions sur place. Généralement, les demandes concernent surtout des échanges d’expériences et de l’expertise, car l’enseignement agricole arménien est encore très théorique, mais en pleine évolution. La diversité de l’enseignement agricole français – la mise en place de travaux pratiques, l’utilisation de fermes pédagogiques, l’apprentissage – sont de réels supports pour aider à rénover l’enseignement agricole arménien.
Quels besoins avez-vous identifiés dans la section d’enseignement agricole du Lycée professionnel Patrick Devedjian d’Idjevan ?
E. B. : J’ai rencontré le personnel du lycée lors de deux missions en Arménie. Cette équipe est soucieuse de rénover l’enseignement agricole et consciente de la nécessité de développer l’enseignement pratique. La ferme-école de Lusadzor est une bonne structure pour accueillir les élèves lors des travaux pratiques. Comme dans de nombreux établissements arméniens, l’autre défi est le recrutement d’enseignants de zootechnie et d’agronomie qui soient formés à l’enseignement pratique. Et une problématique plus générale, qui existe aussi en France, est d’arriver à attirer la jeunesse vers les métiers de l’agriculture.
Sur quels projets avez-vous travaillé lors de votre dernière mission en novembre ?
E. B. : Trois projets ont été menés. Tout d’abord, en Normandie, j’ai accueilli pendant une semaine deux directrices d’établissements arméniens, l’une de Gumri et l’autre de Vanadzor. Ensemble, nous avons visité six établissements français (établissements privés, publics et de l’enseignement supérieur) afin de découvrir le système d’enseignement agricole français, notamment l’apprentissage et l’alternance. La semaine suivante, deux expertes travaillant dans des établissements agricoles français ont découvert le lycée agricole d’Idjevan, accompagnées de Max Delpérié et de moi-même. Le but de cette mission était d’observer et d’évaluer les pratiques pédagogiques, organisationnelles et éducatives de cet établissement. Cette mission se poursuivra en février 2025 pour faire part de leur analyse et de discuter de leurs propositions avec la direction du lycée d’Idjevan.
Le troisième projet s’est déroulé dans le Syunik, dans l’établissement de Sissian. Deux enseignantes d’établissements français sont venues discuter de la pratique de l’agro-pastoralisme sur les exploitations agricoles de leur lycée. Au cours de cette mission d’observation, nous avons pu faire connaissance avec l’établissement, échanger avec les professeurs, les agriculteurs et les élèves, et visiter des exploitations agricoles afin de comprendre les problématiques et de pouvoir ensuite proposer une formation pour la gestion des pâturages répondant aux attentes des agriculteurs du Syunik. Enfin, en février 2025, une étudiante de l’université agraire d’Erevan va participer au Concours Européen des Jeunes Professionnels du Vin du Salon de l’Agriculture à Paris.
* Bureau des Relations Européennes et de la Coopération Internationale.