UMAF Lyon : Mobilisation sur tous les fronts !
[24 septembre 2025] - Propos recueillis par Achod Papasian

Depuis plus de quarante ans, l’UMAF Lyon Rhône-Alpes mène des actions de coopération médicale et humanitaire alliant envoi de matériel, formation continue, organisation de congrès et programmes sociaux. Nous avons rencontré son président, le Dr Hampar Kayayan, radiologue exerçant à Vienne, pour en savoir plus sur les actions – passées et présentes – de l’association, ainsi que sur l’évolution de l’imagerie médicale en Arménie.

Comment est né votre engagement dans le domaine de la santé en Arménie ? 
Hampar Kayayan : Tout a commencé lors de la première guerre d’Artsakh. À cette époque, la ville de Vienne a commencé à tisser des liens avec la ville de Goris, ce qui a abouti à un jumelage en 1992. Avec la municipalité de Vienne, la communauté arménienne et notre hôpital, nous avons envoyé beaucoup d’aide à Goris, car la ville était bombardée par les Azéris. Nous avons notamment envoyé deux appareils de radiologie mobile – un pour Goris et un pour Stepanakert – ce qui était crucial à ce moment-là. Dans le cadre du jumelage, j’ai fait partie de la deuxième délégation qui s’est rendue à Goris. C’est là que nous avons posé les bases pour la collaboration entre notre hôpital et celui de Goris.

Depuis le jumelage, quelles actions avez-vous menées en collaboration avec l’UMAF Paris ?
H. K. : En 2007, j’ai initié l’envoi du tout premier scanner dans le Syunik, grâce à notre coopération avec l’association Vienne-Goris. Dans le même temps, nous avons aussi envoyé un mammographe et un amplificateur de bloc chirurgical. Avant cela, en 2006, nous avions envoyé 150 lits d’hôpital : cent pour l’hôpital de Goris et cinquante pour l’hôpital de Shushi. À chaque expédition de matériel à Goris, nous envoyions des équipements pour le pavillon chirurgical de l’hôpital de Shushi qui avait été rénové par l’Organisation Terre et Culture. Toujours sur le plan de l’équipement, nous avons aussi équipé ces hôpitaux en microscopes électroniques et en matériel ophtalmologique. Et en termes de formation, nous avons accueilli à Lyon plusieurs médecins arméniens qui souhaitaient se spécialiser dans différents domaines comme la chirurgie, la cancérologie ou les prothèses.

Comment vous êtes-vous mobilisés lors de la guerre de 44 jours ?
H. K. : Dès les premiers jours du conflit, nous avons mobilisé notre réseau pour acheminer l’aide venue de France, mais aussi des pays 18 francophones voisins. Dans notre région, nous avons mis en place des points de collecte de médicaments. Pour certains types de médicaments comme les opioïdes, nous avons dû batailler pour obtenir les autorisations. Nous avons aussi envoyé un grand container de matériel en collaboration avec différentes associations françaises ou arméniennes. La Fondation Aznavour nous a été d’une grande aide pour la partie logistique et la distribution. Sur place, nous avons été parmi les premiers à apporter de l’aide aux familles déplacées à Goris, mais aussi à Stepanakert. Pendant la guerre, nous avons organisé la première mission médico-chirurgicale à Erevan, à l’initiative du Dr Aram Gazarian, membre de l’UMAF Lyon, en partenariat avec les Hospices Civils de Lyon. Une douzaine de missions médico-chirurgicales ont été menées depuis, au nom des Hospices ou de l’UMAF Lyon. Nous avons continué après la guerre à envoyer des containers de produits d’hygiène et des équipements médicaux, dont des lits pédiatriques motorisés. Et au moment de l’exode de septembre 2023, nous nous sommes de nouveau mobilisés pour envoyer des médicaments pour les brûlés, notamment des antibiotiques et des anti-douleurs.

Parlez-nous de votre rôle dans lé développement de la radiologie en Arménie...
H. K. : Depuis longtemps, j’avais l’intention de faire un rapprochement entre la Société française de Radiologie et l'Association des radiologues d'Arménie. Chaque fois que j’allais à Erevan, je rencontrais des radiologues membres de l’association, mais cela ne donnait rien, car les personnes en place préféraient avoir le « monopole » des connaissances. Mais en 2016, il y a eu un changement de direction et ce sont de jeunes radiologues qui ont pris la tête de l’association. Et eux n’avaient qu’une envie : s’ouvrir à l’extérieur. Ensemble, nous avons organisé, en mai 2017, le premier Symposium franco-arménien d’imagerie médicale, placé sous l’égide de la Société française de Radiologie. J’y ai participé avec deux professeurs de l’Université de Lyon et nous avons présenté nos cours en imagerie ostéoarticulaire et en neuro-radiologie, traduits en arménien. En 2018, le président de l’association arménienne est venu participer aux Journées Francophones de Radiologie et l’année d’après, nous avons accueilli une jeune radiologue arménienne lors de ces mêmes journées. En octobre 2021, nous avons soutenu l’organisation des ateliers d’échographie ostéo-articulaire. En 2023, il y a aussi eu des changements au sein de la Société française de Radiologie, avec la nomination d’un nouveau responsable des relations internationales. Avec lui, nous avons voulu aller plus loin et faire en sorte que les symposiums se tiennent tous les deux ans. C’est ainsi que le deuxième symposium a été organisé à Kapan, en novembre 2024. Pour l’occasion, nous avons invité quatre professeurs de radiologie cardio-vasculaire et de neuro-radiologie venus de différents CHU de France. C’était le premier congrès de cette envergure dans le Syunik et ce fut un franc succès. Le prochain congrès est prévu pour 2026, cette fois-ci à Gumri. Par ailleurs, l’Arménie sera aussi le pays à l’honneur lors des Journées Francophones de Radiologie qui se tiendront en octobre 2026.

Quels sont selon vous les défis à relever dans le domaine de l’imagerie médicale en Arménie ?
H. K. : Au niveau de la formation, il y a une grande différence entre la France et l’Arménie. En France, la formation en imagerie médicale dure cinq ans, contre deux ans en Arménie. En France, la radiologie est enseignée dans sa globalité, à travers toutes les spécialités, alors qu’en Arménie, à la fin de ses études, un jeune radiologue doit se limiter à une seule spécialité comme l’échographie, le scanner, l’IRM, etc. À Erevan, il y a de bons radiologues, chacun spécialisé dans son domaine. Mais l’approche dominante en Occident est celle des radiologues généralistes qui ont un socle de base pour apporter une réponse à toutes les situations cliniques, tout en étant spécialistes comme les neuroradiologues, les radiologues ostéoarticulaires, etc. Il faudrait une vraie volonté de changement au niveau de la faculté de médecine afin de prolonger la durée de formation des radiologues. Il est également important de développer l’imagerie médicale de proximité dans les provinces.

Sur quelles actions l’UMAF Lyon travaille-t-elle actuellement ?
H. K. : Nous travaillons en ce moment sur le projet de bus dentaire dans le Syunik que nous avons initié fin 2023. Ce bus va se rendre dans tous les villages et les écoles de la région pour dispenser des soins gratuits et faire de la prévention en hygiène bucco-dentaire. En 2012, l’UMAF Paris a déjà mis en place un bus de ce type dans le nord de l’Arménie. Pour ce faire, nous avons l’appui de plusieurs associations françaises et de quelques collectivités, notamment la région Rhône-Alpes, mais aussi nos donateurs. Le bus est actuellement en cours d’aménagement à Erevan et devrait être fonctionnel d’ici l’automne. En parallèle, nous continuons à financer différentes acquisitions de matériel à destination du Syunik. Avec les médecins des Hospices Civils de Lyon, nous souhaiterions notamment apporter un soutien au développement de la chirurgie orthopédique.

 

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